mercredi 2 novembre 2016

LEK - XIX





















Exposition solo de  LEK à la Galerie 42b du 3 novembre au 3 novembre 2016.
Vernissage le jeudi 3 novembre à partir de 18h en présence de l'artiste.
1 rue Notre-Dame de Nazareth Paris 3e



L'exposition "XIX " 
Des toiles abstraites, nerveuses, raffinées. Comme autant de pages d'un carnet de voyage, de flânerie citadine, d'exploration urbaine. Pour son exposition "XIX" à la galerie 42b, Lek nous emmène en Italie à la découverte de sa Rome. Celle qu'il a arpentée durant une année. Des cathédrales millénaires aux rives du Tibre. Des marbres antiques polis par les siècles aux murs couverts de graffitis qui s'effacent lentement, usés par le temps.

À la fin de l'été 2015, le duo Lek et Sowat est admis à l'académie de France à Rome. Ils sont les premiers artistes issus du graffiti à intégrer la prestigieuse institution. Durant une année, dans cet espace clos et paisible aux allures de prison dorée qu'est la Villa Médicis, ils partagent un vaste atelier de 80m2, celui qu'occupa Jean-Dominique Ingres trois siècles avant eux. Un laboratoire dédié à l'art, propice à la création, où les deux acolytes reviennent à la source de leur pratique : la peinture. Pour Lek, c'est l'occasion de prendre du recul, faire la synthèse des années passées, expérimenter, et surtout, prendre le temps. Car c'est bien de temps dont il s'agit. Le retenir, le laisser filer, jouer son diktat, contrôler sa course…

À ses yeux, chaque toile à sa propre temporalité. Temps de gestation, rythme d'exécution, durée de séchage… Tel un chimiste, il multiplie les expériences, mélange les ingrédients, triture le support. Invariablement, Lek cherche les matières. Celles qui ont jalonné son parcours de graffeur, ses déambulations urbaines de la ville lumière à la ville éternelle. De ces non-lieux où survivent réfugiés et exclus de la société, il retient ces lignes de vêtements chiffonnés qui sèchent devant les abris de fortune. Sa manière de les traduire procède de la gestuelle lorsqu'il froisse ou plie ses toiles qui brassent une peinture fraîche, diluée, et s'épand sur la surface accidentée en marbrures fantomatiques. Comme sur ces murs où les graffitis disparaissent sous la pluie mêlée à la crasse et révèlent des formes abstraites, nuancées, dégoulinantes. Minutieusement, Lek les retranscrit sur toile en une mixture colorée.

Fusions et transparences, superpositions et effacements, enchevêtrements et imprégnations ; par jeux de couleurs contrastées, de savants pliages, l'artiste illustre l'ADN de la ville sous forme d'origamis modernes. Entre ordre et chaos, il découpe l'espace de ses formes géométriques apparemment aléatoires et pourtant savamment ordonnées. Cette signature graphique est le fruit de trente ans d'expérimentations plastiques menées au coeur des villes, que l'artiste a longuement étudiée puis couchée sur toile pour livrer une exposition à mi-chemin entre autobiographie et manifeste. Ainsi, dans chacun de ses tableaux, Lek dévoile une identité, révèle un lieu, défini un temps et suggère un processus. Une mosaïque née du tissu urbain, construite dans l'urgence et couchée avec patience.

L'artiste LEK 
Au milieu des années 80, le jeune Frédéric Malek use ses baskets dans le XIXe arrondissement de Paris. Aux abords de la station Stalingrad, un terrain vague coincé entre le métro aérien et les lignes du RER se pare de hiéroglyphes multicolores. Ce no man's land est l'épicentre du Hip Hop européen. Le jeune adolescent y découvre une culture naissante, un univers underground où l'on se défie à coups de rimes acérées, de pas de danse acrobatiques et d'alphabets stylisés tracés à la bombe de peinture. Au contact de la première génération de graffeurs parisiens, il observe cette communauté fermée, apprend ses règles, ses codes et ses différentes écoles mais ne s'inscrit dans aucune d'entre elles.
Armé des trois lettres de son nom d'emprunt, Lek cherche une identité graphique qu'il trouvera dans les friches industrielles de la région parisienne. Au coeur de ces colosses d'acier et de béton, il développe une esthétique personnelle, mixant le lettrage avec des influences du Bahaus, de l'abstraction, du futurisme et de ses années passées à étudier l'architecture. Rapidement, il transcende les codes classiques du graffiti pour se diriger vers des compositions minimalistes, saccadées et déconstruites où la structure du lieu sert à la fois de décor, de partenaire et de point d'appui. À grands coups de bombe, de rouleau, de film plastique ou de matériaux récupérés sur place, il lacère l'espace, brise les lignes de fuite et révèle de nouvelles perspectives.
Lek figure ainsi parmi les premiers graffeurs français à définir un mouvement "post-graffiti". Dès les années 90, désireux de rompre avec les clichés d'un mouvement graffiti stéréotypé, une poignée de graffeurs cherche de nouvelles façons d'interagir avec leur environnement et défendent une posture artistique alors largement ignorée du grand public et des institutions. Contre vents et marées, Lek développe au fil des années une discipline qui mêle exploration urbaine et intervention plastique.
Une pratique qu'il pousse à son paroxysme lorsqu'avec Sowat, ils investissent en 2010 un supermarché abandonné pour le transformer en résidence artistique sauvage et collective. Ce Mausolée, temple d'un graffiti brut et instinctif, leur ouvre deux ans plus tard les portes du Palais de Tokyo, du centre Georges Pompidou puis en 2015 celles de la Villa Médicis à Rome.



Texte et biographie par Nicolas Gzeley



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